2 semaines intensives à l’hôpital pour traiter les migraines, une idée allemande

Par Migraine Québec • Le 4 mars 2016


Le Centre des Céphalées de Kiel: Passer 2 semaines à l’hôpital pour améliorer les céphalées chroniques, une approche intensive et globale.

(Pour visiter le site de la clinique)

 J’ai passé fin-mars 2016 4 jours au Centre des Céphalées de Kiel (Kiel Schmerzklinik). Ce centre, un hôpital en fait, offre une approche très intéressante pour les patients souffrant de céphalée chronique. 60 lits sont disponibles (et il y a 6 mois d’attente!). Il y a des médecins et des infirmières sur place. Le séjour est remboursé par les assurances, publique et privées, selon des critères précis (surtout la chronicité et la sévérité du problème de céphalée). Les patients sont admis en moyenne pour 2 semaines, dans des chambres privées ou à deux. Durant leur séjour, il y a une évaluation médicale, les médications sont ajustées, le sevrage médicamenteux est fait si nécessaire, des perfusions intra-veineuses sont administrées au besoin. Quand on sait ce que c’est qu’un sevrage médicamenteux, on peut comprendre que le faire sous supervision médicale dans un environnement calme est une idée intéressante.

Ce séjour de 2 semaines permet aux patients de faire une pause et de se concentrer sur la meilleure façon de gérer leurs maux de tête. Le centre offre une approche interdisciplinaire avec des séminaires d’éducation, des CD d’apprentissage des différentes techniques. Tous les patients sont évalués par un psychologue et ont accès à des séances de physiothérapie ainsi qu’à des initiations à diverses approches de gestion des maux de tête comme le biofeedback ou la relaxation.

On peut dire que ce centre est en quelque sorte la Cadillac du traitement multidisciplinaire. La satisfaction des patients est très élevée, bien entendu, mais des statistiques publiées montrent aussi que durant les 2 années suivant leur séjour les patients consomment moins de soins de santé que durant les 2 années précédentes. Ceci signifie que le centre est un bon investissement pour les assureurs. Les patients consultent moins, utilisent mieux leurs médications, et manquent moins de jours de travail.

Cette analyse d’efficacité est rendue possible par l’excellente organisation informatique du système de santé allemand. Les systèmes sont centralisés, sont en mesure de produire ces analyses d’efficience, et de reconnaître l’impact des maux de tête sur le fonctionnement d’une personne. L’approche intensive porte fruit au long terme.

Les patients allemands ne sont pas différents des patients québécois. Les migraines sont les mêmes, les défis sont les mêmes: comment traiter, quel préventif essayer, comment éviter les effets secondaires. L’impact des maux de tête sur l’humeur et le sommeil est aussi très important. Il y a aussi des personnes souffrant de problèmes difficiles à diagnostiquer ou traiter, qui ont tout essayé et espèrent que la recherche avance pour leur donner de nouvelles options.

Mêmes problèmes, donc mais gestion différente. Ceci dit, le centre de Kiel est unique en son genre, non seulement en Allemagne mais même dans le monde. Son directeur, le Professeur Göbel, est un pionnier dans le domaine qui a travaillé d’arrache-pied pour mettre le tout en place et négocier les remboursements des assurances. Il a aussi écrit des livres pour les médecins et les patients, reconnaissant l’importance de l’éducation pour le progrès des soins.

Le centre de Kiel a inspiré des centres similaires au Japon et au Danemark. Peut-on imaginer un centre de ce genre au Québec? Probablement pas pour le moment. Avec les coupures dans le système, il est impensable d’hospitaliser des patients qui ne sont pas malades de façon sévère et aigue, ou encore ayant besoin d’une chirurgie. De plus, le Ministère est très centralisateur en ce moment, et la création d’un programme innovateur est difficile lorsque les contraintes administratives sont élevées et les ressources très limitées.

Un programme en externe pourrait être mis sur pied, mais évidemment le financement serait un problème puisque le gouvernement ne rembourse ni la physiothérapie, ni la psychothérapie, ni l’éducation thérapeutique. Et les perfusions intra-veineuses seraient très difficiles à financer dans une clinique externe. C’est dommage, car d’après ce que j’ai pu voir, le fait de consacrer deux semaines intensives à la prise en charge des céphalées chroniques est un investissement valable pour une personne.

Bref, beaucoup de réflexions sont à venir, mais la visite de ce centre a été très motivante et intéressante. Évidemment, la première chose à faire est de convaincre notre Ministère que les céphalées sont un problème réel qui mérite un investissement….la partie n’est pas gagnée. Cependant je ne vois pas pourquoi la société québécoise ne pourrait pas s’inspirer de ce qui se fait de mieux et de plus innovateur dans d’autres pays!

 


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