Émerveillement

Par Maryse Loranger • Le 18 juillet 2023


« Il faut que le noir s’accentue pour que la première étoile apparaisse. »

– Christian Bobin

En cherchant des inspirations pouvant avoir un lien avec mon projet d’écriture : L’aviateur de mon cœur, je me suis arrêtée sur cette très belle phrase de Christian Bobin, ce poète et auteur dont la foi était de l’ordre de la contemplation. Personnellement, je me sens souvent dans un état d’émerveillement que ce soit en randonnée en forêt, devant la beauté de la nature, en présence de mes ami·es qui me partagent leurs vécus aux histoires inspirantes ou simplement à l’écoute d’une musique qui m’enivre de tellement d’énergie que je peux me mettre à danser, là, dans mon salon. Malgré ce que la vie m’a imposé comme restriction due à une santé branlante lorsque les crises de migraine se présentent sans fin, je choisis de vivre dans l’émerveillement. C’est mon moyen de survie pour traverser chaque journée. Car, quand bien même que les gens ne pourraient voir si je suis dans une des phases de migraine, en prodrome, postdrome ou crise aiguë, je vis un branle-bas de combat intérieur chaque jour de ma vie à savoir quand et comment se manifestera la crise de migraine. Parce que oui, en effet, elle est constamment présente et les questions peuvent venir de toute part. Par exemple : vais-je vivre ma crise ce matin, en après-midi ou en soirée? Ou est-ce que ce sera en plein milieu de la nuit alors que je ne peux plus la contrôler? Puis-je me permettre une sortie de plein air alors qu’il annonce 35 degrés? Puis-je prendre une bière avec mes ami·es? Puis-je manger sucré, salé, gras ou végétarien? Est-ce que je vais dans un restaurant qui risque d’avoir de la musique trop forte? Est-ce que je fais mon gazon et mon désherbage? Peut-être que faire les deux, c’est trop? Devrais-je prendre deux jours pour effectuer mon travail sur le terrain? Est-ce que je dérange les autres avec le sujet qui me préoccupe, ceci étant dit, la migraine? Est-ce que faire savoir aux autres si j’ai la migraine est utile? Est-ce que faire savoir aux autres que j’ai la migraine est inutile? Ouf et re-ouf! Ces questions sont juste un maigre reflet de tout ce qui peut se passer dans mon cerveau déjà bien assez inflammé.

Qu’arriverait-il de mon existence si je suivais le chemin tracé par de telles questions? En fait, la réponse est simple. Je ne ferais plus rien. Et qu’arriverait-il si je m’abandonnais au découragement et aux murs que m’impose cette réalité? La réponse est encore plus simple. Non seulement je ne ferais plus rien, mais je vivrais avec la culpabilité de regarder ma vie passer et de ne pas y participer. Je ressentirais ma vie comme un poids et non un levier pour m’épanouir. Je me laisserais aller vers l’immobilité qui est sans contredit, la mort certaine. Pas une mort au sens figurée, mais une mort de l’être, du soi et de l’âme. Peut-être ai-je été habituée depuis l’enfance à la mélancolie et à l’absence. Du plus loin que je me souvienne, je me suis très souvent adaptée aux situations malaisantes ou désagréables. Les peines, les deuils, les déceptions et même les trahisons ont été pour moi un terrain d’exercice pour ce qui deviendra plus tard, partie intégrante de mon existence. Non pas que c’était absolument nécessaire, mais comme ce fût partie prenante de mon passé, je vois maintenant toutes ces étapes comme quelque chose de positif. Je les vois comme des éléments qui allaient me forger pour affronter les grands changements qui allaient survenir dans un futur pas si lointain. 

C’est un choix de voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. C’est ma stratégie pour contrecarrer les émotions négatives qui viennent bras dessus bras dessous avec la migraine chronique. C’est également un outil que j’utilise de facto face à tout ce qui vient me perturber ou tout au moins perturber ma paix intérieure. Comme quelqu’un m’a fait remarquer dernièrement, on ne peut faire l’économie d’un deuil ou d’une perte, d’une peine ou autre sentiment de manque. Mais on peut y pallier avec une approche sereine et balancée en sachant qu’il n’y a rien de permanent. Il n’y a que du mouvement!

En conclusion, je nous souhaite à tous et toutes de faire des choix de vie épanouissants de l’intérieur vers l’extérieur. De mon côté, j’ai choisi de vivre chaque jour comme si je ne voulais jamais me remettre d’être sur Terre, de demeurer étonnée comme un nouveau-né, et de garder un appétit immense du « jamais vu » de la vie. 

Avec émerveillement,

Maryse Loranger – Juin 2023


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