Clair-obscur

Par Maryse Loranger • Le 28 juillet 2023


Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Ce beau proverbe célèbre prend tout son sens dans ma vie. En seulement deux jours, bien des choses peuvent se passer comme ne pas se produire dans la vie d’une migraineuse. Il y a cette part d’espoir et cette autre part qui s’installe dans le corps comme un sentiment d’appréhension, tel un clair-obscur. C’est que je viens de me réveiller quasi en pleine nuit avec un poignard planté à la base de mon crâne du côté droit. Pourtant, j’étais si bien hier…

Je contemple le tableau de Da Vinci La Scapigliata (« L’Échevelée » ou « L’Ébouriffée ») et j’y discerne le portrait d’une jeune femme. Cette toile présente des oppositions entre un visage achevé, la chevelure et les épaules à peine esquissées. Je ne vois que des similitudes entre la migraine chronique et ce travail artistique qui met en valeur les ombres pour en faire ressortir la lumière. Combien de fois suis-je capable de garder cachée dans l’ombre cette migraine dans tous ses états pour favoriser ce que j’ai à offrir aux autres de lumineux?

Il se peut que mon blogue vous emporte vers des contrées inexplorées. C’est que, comme toute personne vivant avec un cerveau surstimulé, je mets tout ce qui m’habite à contribution pour donner un sens à ce que je vois, ce que j’entends, ce que je sens et surtout, ce que je ressens, pour garder espoir dans ce refuge qui est le mien, mon corps et mon esprit en passant par le cœur. La lecture qui suit est simplement un brin de ma vie au gré du vent et de ce qu’il m’apporte de calme, de santé et de réflexion. Je vous l’offre avec plaisir et autant de douceur que la dégustation d’un bon sorbet à la mangue par une journée chaude d’été en compagnie d’une amie aussi précieuse que tout l’or au monde.

Un matin

Mots clés : Commencement, joie, lumière, espoir

Assise confortablement dans le grand salon, j’écris en attendant l’effet de mon triptan en vapo tout en écoutant le silence de la maison. Une jeune famille dort dans la petite chambre au lit superposé. Les deux chiens sommeillent comme s’ils savaient que malgré la lumière matinale, il est encore trop tôt pour se lever. Tous et toutes dorment paisiblement et rattrapent quelques heures de sommeil manquantes. Il est 6 h 25 AM. Je sirote mes dernières gorgées de café en planifiant déjà mon prochain. J’observe les arbres immobiles qui se dressent comme des pratiquants à la messe, debout, bien droit, en attente de la bonne nouvelle. Seul le brouillard se déplace de l’autre côté du lac. L’aube fait place à cette lumière du jour tirant au jaune. L’eau du lac se déplace aussi grâce à ses différents petits courants créés par les cinq ruisseaux afférents qui se jettent dedans. C’est un nouveau départ, une nouvelle journée avec de nouveaux espoirs. Ce que je me souhaite est une journée sans crise de migraine, mais bon. 

Le lac

Mots clés : fraîcheur, douceur, abandon, guérison

Il y a une heure, je me sentais comme un de ces ruisseaux. Tout doucement, je me suis rempli des ions négatifs fournis par l’eau de pluie (les ions négatifs sont positifs pour la santé), des gouttelettes minuscules au son symphonique tombant dans le lac. Sous le regard de ma petite louve Loki, bien installée sur le quai, tout au bout, je me suis laissée aller dans l’eau douce et tiède du lac. Mon réveil brutal avec une douleur déchirante du côté droit de ma boîte crânienne m’incita à passer à l’action pour prendre soin de cette bête déchainée de la migraine. Ma solution, le lac!

C’est la deuxième fois que je fais cette expérience de me diriger vers cette étendue douce magnifique pour m’y submerger la tête, le corps et l’esprit. J’y trouve une détente instantanée. Il y a sûrement une explication aux effets de l’eau sur la douleur physique, ici étant celle de la migraine. Peut-être dois-je en demander la réponse à l’intelligence artificielle? Ou simplement m’immerger dans l’expérience?

La forêt

Mots clés : Cathédrale, apaisement, ressourcement, refuge

De nos jours, il semble que tout doit être intellectualisé. Quoiqu’il y ait certainement une explication et une stratégie à explorer avec le bain matinal et la guérison, j’ai soudain une envie, un élan, à laisser mes sensations, mes ressentis prendre le relai plutôt que de chercher des explications. Si je me rappelle bien, étant plus jeune, je faisais des randonnées en forêt et en ressentais très vite les bienfaits. Le calme induit dans tout le corps se faisait sentir. Les effets de la montée en montagne puis de sa descente, la durée, la température et ses changements selon le niveau d’altitude, bref, tous ces éléments contribuaient à dépenser l’énergie au maximum. Ainsi, j’obtenais la détente du système nerveux directement. Tout ceci sans compter la présence majestueuse de la forêt avec ses couleurs variées, ses différentes plantes indigènes, les essences d’arbres aux fractales infinies, les odeurs et les sons fabuleux que l’on y trouve.

Il y a et il y aura toujours dans la forêt, qu’elle soit nordique ou tropicale, cette magie de guérison. Ça fait longtemps que les Japonais en ont fait leur lieu de prédilection avec le concept des bains de forêt. Personnellement, je m’y sens bien, je m’y sens à la maison et c’est bien au sein même d’une forêt que je suis de retour au refuge ultime qui est mon corps, malgré la douleur, malgré la migraine.

La maison

Mots clés : Corps, ressenti, émotions, expansion

Expansion est le mot clé le plus fort et le plus précis de ce que la maison représente. Je vois ma maison physique, non pas comme un lieu avec un toit, mais plutôt, mon corps avec tout ce qu’il renferme comme sensations, mémoires, émotions et capacité à s’exprimer. Pendant si longtemps, mon corps m’aura permis de sentir le mouvement, les efforts techniques du ballet, les maux associés aux tensions soutenues, aux muscles endoloris, aux limites de ce que les articulations peuvent endurer. Mais ce corps a aussi ressenti de la joie à laisser aller. À faire des efforts puis à relâcher. À espérer la destination, la toucher puis la dépasser. Et ainsi mon corps m’a donné de multiples opportunités pour gravir les marches, les étapes vers les horizons ultimes que je m’étais donnés. C’est merveilleux de constater que tous mes défis sont associés au corps en passant toutefois par le cœur. Et j’en viens aussi à la réflexion que tous mes défis n’ont été que des passages vers d’autres avenues. Serait-ce possible de penser que la migraine n’est qu’un de ces passages, aussi ardus et difficiles soient-ils? À méditer…

Le cœur battant pour chaque défi,

Le cœur permettant de vivre notre vie,

Le cœur explorant tout mouvement,

Le cœur présent pour vivre les changements, 

Les changements annonçant une vie nouvelle,

La vie étant un changement perpétuel.

Avec douceur et espoir,

Maryse

 


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4 Commentaires
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Maryse
Maryse
il y a 8 mois

C’est fou comme la migraine ou la maladie nous oblige à prendre un temps d’arrêt pour se regarder de l’intérieur et admirer l’extérieur. Je suis de tempérament très terre à terre. Comme disait ma mère, émotionnellement, je n’ai que l’hémisphère gauche du cerveau qui fonctionne 😆 je serais toujours dans le tourbillon boulot-dodo si la maladie ne m’avait pas arrêté. Ton texte me fait remonter un souvenir: j’étais au chalet chez des amis et en pleine nuit, comme toi, elle me réveille. J’ai eu droit au plus beau lever de soleil de toute ma vie sur le lac. Les autres dormaient et non pas eu droit à ce spectacle majestueux. Comme quoi, on peut voir du beau malgré… merci pour ton texte Maryse 🧡

Maryse Loranger
Maryse Loranger
il y a 7 mois
En réponse à  Maryse

Tu as bien raison, on peut voir du beau et l’apprécier malgré tout ce que cette maladie nous fait vivre. Merci pour ton partage. Ça fait du bien.🙏🏼

Louise
il y a 8 mois

Ton texte a une portée universelle, Maryse. Remplaçons « migraine chronique » par « émotions » ressenties à la suite d’une interaction humaine difficile. Et la même question se pose : suis-je capable de garder cachée dans l’ombre ces sensations négatives pour favoriser ce que j’ai à offrir aux autres de plus lumineux ? J’y travaille, merci de mettre des mots sur une actuelle remise en question.

Maryse Loranger
Maryse Loranger
il y a 7 mois
En réponse à  Louise

Merci Louise pour ce lien que tu fais avec les émotions. Elles sont nos meilleures guides. 🙏🏼