4 humains – Maryse

Par Maryse Loranger • Le 30 mars 2022


« Peut-être que lire et écrire, comme rêver et penser, ne servent qu’à faire baisser l’intensité du bruit dans le monde. » – Dany Laferrière, Journal d’un écrivain en pyjama

Le texte qui suit fait partie de ma série de quatre blogues qui ne sont destinés qu’à mettre en lumière les témoignages, ou plutôt la backstory des personnes qui ont participé à la création du vidéoclip Migraine. Si vous ne les avez pas lus, aucun souci. Toutefois, si vous mourez de curiosité de connaître les trois autres personnes clés de ce projet, ne manquez pas votre chance d’aller les découvrir. Pour vous faciliter la tâche et vous éviter une recherche sur le site où nous nous trouvons déjà, je vous ai mis les liens en bas de ce texte.

Pourquoi écrire sur ces gens alors que nous sommes sur un site qui parle de migraine et de céphalées, et qui a pour mission, et je cite, « d’offrir du soutien et de l’information à l’échelle du Québec aux personnes vivant avec la migraine ou des céphalées ainsi qu’à leurs proches, afin de les aider à mieux gérer leur condition et à briser leur isolement. »

Approchez-vous, je vous chuchote pourquoi. Vous avez remarqué que j’ai mis des parties en caractères gras. C’est que le processus de création et de réalisation du projet a trouvé ces mots très précieux sur sa route. Dans cette aventure visant la sensibilisation du grand public aux enjeux de la migraine, il y a eu quatre humains qui vivaient avec la migraine, directement ou indirectement, et qui ont donné de leur temps et énergie à cette création. Comme j’ai déjà écrit sur Chantal, Alexandre et Micael, et que vous avez un accès rapide à leurs histoires avec les liens plus bas, aujourd’hui, je plonge, tête première, sans censure et encore moins d’inhibition, pour vous raconter ma backstory.

Je me suis gardée en dernier pour cette série de textes car je vous avoue avoir pensé ne pas me révéler dans ce merveilleux voyage. Un peu comme une fleur que l’on garde soigneusement entre les pages d’un livre pour revivre les doux moments qu’elle nous rappelle lorsqu’on l’expose à nouveau, j’ai eu cette hésitation. Sans savoir si mes mots vont vous interpeller, je me lance en souhaitant que vous, chers lecteurs et lectrices, y trouviez ce petit quelque chose, ce « je ne sais quoi » qui captivera votre attention. Au mieux, vous serez inspirés à vous révéler vous aussi, au pire, vous aurez lu l’histoire derrière les histoires.

Pour celles et ceux qui ont connu la chanson thème de Fanfreluche, je vous invite à fredonner le refrain suivant :

Je vais donc vous raconter,
Mon histoire à ma manière,

Je vais donc vous raconter,
Mon histoire pour vous amuser.

Les mots

Il était une fois un poème style rap sur une page Facebook. Je lis cette œuvre intitulée Migraine, et les mots touchants, vibrants et surtout plus vrais que vrais, me donnent la chair de poule. C’est que ce texte parle de moi et de tous ceux et celles qui vivent avec la migraine. L’expérience d’une crise est décrite avec tellement de réalisme que plus je le lis, plus les larmes me montent aux yeux. Je me retiens car les pleurs me déclenchent une migraine. Ce serait fou quand même puisqu’en ce moment ce sont des larmes de joie mêlées à de la reconnaissance que quelqu’un ait pu donner une voix à l’expérience de la migraine. Capsyko a signé ce texte. J’en suis instantanément enveloppée comme si une vague venait de me passer par-dessus la tête avec douceur. Je me laisse porter par cette vague ondulatoire et tout à coup, je ressens un rythme, je vois des formes et des couleurs et voilà que le projet se tient debout, droit devant, tel un obélisque égyptien au milieu d’une place publique romaine que l’on voit tout à coup en tournant le coin (cas vécu, mais ça c’est une autre histoire!).

La musique

Je pense spontanément que ce texte sera parfait pour faire comprendre et surtout faire entendre le message de la lourdeur d’une crise de migraine au grand public. Je contacte Capsyko directement par Messenger pour demander s’il aimerait collaborer avec Migraine Québec et mettre ce poème en musique. Puis je parle de ma démarche à Louise Houle, notre directrice générale, qui me donne son approbation pour ce projet. Je suis aux anges! Mais attention, une autre vague arrive bientôt. Je reçois les paroles sur un fond musical signé par un collaborateur ponctuel de Capsyko et hop! Je suis littéralement emportée au large, dans le monde de tous les possibles. La symbiose paroles et musique est parfaite. Elle vient chercher toutes les nuances des sensations que l’on peut vivre en crise de migraine. Un mélange de douceur et d’incertitude. Un amalgame de beauté et de noirceur. C’est l’expression même de ce que je vis, répétitivement, chroniquement, depuis des dizaines et des dizaines d’années. Ça y est, j’ai encore ce frisson qui me traverse et je ne tiens plus en place. Une phrase me passe en tête : cette œuvre doit être mise en images. Nous devons toucher le plus de monde possible. Nous avons la possibilité de faire entendre et de rendre visible ce qu’est ce mal invisible, cet animal à apprivoiser qui s’appelle migraine.

Les images

Sortir des sentiers battus n’est pas chose facile, surtout lorsqu’il s’agit de vidéo. La vitesse, le rythme, les changements d’images accrocheuses jusqu’à ne plus vraiment avoir de sens se multiplient dans l’industrie du vidéoclip. On veut vendre un produit, une image, une tendance qui plaira à un public ciblé par son âge, ses habitudes de vie, ses croyances, mais on veut surtout étendre le pouvoir d’influence d’une tendance à la mode du jour. Et la mode, ça change aussi vite que les saisons.

Mon public cible c’est le grand public, et plus particulièrement les proches, la famille, les collègues et les amis des personnes vivant avec la migraine. Car si je suis touchée par les mots de ce poème, ce ne sont pas uniquement les descriptions de la douleur et des effets secondaires que je connais intimement qui m’accrochent tant, mais bien tout ce qui va avec. L’anxiété, la peur de l’inconnu, le souhait que ça s’arrête (par pitié), le désespoir, le deuil. Tout le monde peut comprendre ces sentiments car nous sommes tous des humains qui traversent la vie avec son lot de difficultés et de souffrances. Comme me disait quelqu’un déjà, on a tous nos souffrances et elles ne se comparent pas. C’est vrai. Sauf qu’il est possible de développer de l’empathie et une plus grande sensibilité face à ces émotions que tout le monde peut vivre ou vivra à un certain moment dans sa vie. C’est à cet instant que je visualise ce vidéoclip unique et artistique dont le sujet aussi sensible qu’une brûlure reposera sur des valeurs humaines qui transcendent la mode et toutes les tendances.

Je pense à une seule personne capable de répondre à cet appel. Alexandre Giroux, vidéaste professionnel ayant accroché ses lentilles il y a déjà 11 ans pour se lancer dans une carrière totalement différente. Il est selon moi le meilleur candidat. Je le contacte le même soir que j’ai reçu la musique et en l’espace de quelques minutes, littéralement tout de suite après avoir fait une première écoute, il dit OUI! Je me souviens de ses paroles : « Je veux le faire parce que c’est génial et parce que depuis que je te connais je te vois souffrir de la migraine. Je veux le faire pour toi et pour tous ceux et celles qui vivent ça, mon amour ». Oups! Je ne vous l’avais peut-être pas dit. Alexandre et moi… eh oui! On est ensemble, maintenant partenaire de vie depuis 11 ans.

Le visage

Aussitôt un nouveau feu vert donné par Louise Houle, nous mettons notre bateau à l’eau à la recherche de celle qui incarnera le visage, les gestes et les émotions de cette vidéo. Mon esprit n’avait aucun doute, il fallait que ce soit Chantal. Pourquoi le fallait-il? Il n’y a pas d’explication. Simplement une intuition. Tout comme j’ai eu une intuition à chaque étape de ce projet.

Et nous voilà en route vers un parc merveilleux du bout de l’île de Montréal pour faire du repérage dans un espace inspirant par sa nature et évocateur grâce à ses sites contrastés et ses différentes ambiances. C’est aussi un endroit spécial marqué par les souvenirs d’enfance d’Alexandre, qui a eu la chance d’y grandir bien avant que tout le territoire devienne la propriété exclusive du parc. Personnellement, je suis d’avis que cette rencontre entre le passé et le futur, ponctuée par un projet bien ancré au présent avec des gens de cœur, ne peut que résulter en une belle aventure.

Eurêka

Voilà que moi, Alexandre et Chantal, accompagnée de son conjoint, nous retrouvons par une journée plus que parfaite d’automne pour faire le tournage de ce clip. C’est comme de la magie. Les sites me semblent encore plus beaux que les jours de repérage et il y a une ambiance de confiance et de respect comme si tout le monde se connaissait depuis longtemps. Je ne pourrai jamais exprimer à quel point je me sentais libre et même libérée comme si on m’avait retiré des chaînes aux chevilles. Pendant trop longtemps, j’ai mis des projets de création de côté par peur des crises de migraine, par peur de déplaire aux gens qui ne comprendraient pas si j’ai besoin de calme, de me retirer ou simplement de ne pas parler ni d’animer la conversation. La migraine nous isole tellement. Et plus on s’isole et plus on a de la difficulté à se faire confiance. C’est une chute à cheval qui ne verra pas de remontée en selle. Et si, finalement, sortir du mutisme était la solution? Et si on pouvait choisir ce que l’on veut faire avec qui on veut le faire par respect pour l’autre et encore plus pour nous?

Le montage du vidéoclip s’est fait en peu de temps. Quand je l’ai vu presque finalisé, j’ai été tellement émue. En fait, j’ai pleuré. Pas des larmes de tristesse, mais de gratitude. Je n’aurais jamais pu faire ce projet sans la très grande générosité de cœur et le talent de mes trois complices Alexandre, Capsyko et Chantal, et ce clip ne pourrait être vu et entendu sans la permission de Migraine Québec et la grande confiance de Louise envers mes idées, aussi folles soient-elles.

La sombre réalité de la migraine ou même des céphalées chroniques prend souvent trop de place dans la vie de trop de gens qui font tellement TOUT pour gérer cette maladie neurologique invalidante dont il n’existe pas de cure présentement. Mais elle est invisible et elle est encore en 2022 sujette à la stigmatisation. Parlons-en! Partagez la vidéo! Vous êtes les meilleurs ambassadeurs de notre cause. Et vous êtes surtout remplis de force et de courage!

Prenez grand soin de vous,

Avec douceur,

Maryse

Chantal https://migrainequebec.org/4-humains-chantal/

Micael (Capsyko) https://migrainequebec.org/4-humains-micael/

Alexandre https://migrainequebec.org/4-humains-alexandre/


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