Mieux vivre avec la migraine

 

Neuroplasticité
et migraine

Quand le cerveau devient expert pour déclencher des crises

La neuroplasticité,
qu’est-ce que c’est?

La neuroplasticité est la capacité du cerveau à modifier sa structure et son fonctionnement tout au long de la vie, en réponse à ce que nous vivons.

Elle nous permet d’acquérir de nouvelles compétences : apprendre à marcher, jouer d’un instrument de musique, conduire une voiture. 

Certaines choses que nous apprenons deviennent automatiques : après suffisamment de pratique, nous n’avons plus besoin de réfléchir consciemment pour les accomplir. Dans le cerveau, les neurones se connectent les uns aux autres pour orchestrer la tâche que nous réalisons. Lorsqu’on répète une même tâche plusieurs fois, les connexions neuronales impliquées deviennent de plus en plus organisées, précises et fortes, jusqu’à ce que l’action devienne automatique. Le cerveau connaît alors par cœur le chemin de connexions neuronales à suivre et peut le mettre en branle plus facilement et rapidement. Merveilleux lorsqu’on souhaite apprendre à jouer du piano! Malheureusement, le même phénomène s’applique dans le cas de la douleur. On appelle ce phénomène sensibilisation centrale.

Quel impact la sensibilisation centrale
a-t-elle sur la migraine?

Des études scientifiques évoquent la possibilité que les crises de migraine à répétition puissent amener des changements dans les connexions du cerveau. Ces changements peuvent ensuite mener à ce que les épisodes de crises soient déclenchés plus facilement. 

Les personnes qui vivent avec la migraine sont 3 fois plus à risque de développer la sensibilisation centrale que les personnes qui ne vivent pas avec cette maladie. L’observation d’imagerie médicale de cerveaux migraineux dévoile des altérations structurales et fonctionnelles présentes même entre les crises. L’importance de ces altérations est directement proportionnelle à la fréquence et à l’intensité des crises, ainsi qu’à la durée de la maladie. Des recherches récentes suggèrent que la sensation de douleur pendant 24 heures est suffisante pour initier des changements dans le cerveau! Ces changements ont un impact sur le développement de syndromes de douleur chronique, par exemple, un seuil de douleur abaissé. Cela signifie que le cerveau déclenche une crise de migraine plus facilement, et plus rapidement : il reconnaît les contextes ayant causé des crises dans le passé et aussitôt que des conditions similaires sont réunies, hop!, il poursuit sur le chemin alors emprunté. Il devient expert pour déclencher des crises, et au fil du temps, la personne devient de plus en plus sensible à la douleur.  

Si les chemins neuronaux fréquemment empruntés se renforcent et s’automatisent, l’inverse est aussi vrai : moins les chemins neuronaux sont utilisés, moins ils sont efficaces et d’autres chemins peuvent être empruntés. C’est ce qui explique par exemple l’oubli d’une langue seconde apprise et maîtrisée, mais qu’on ne pratique plus au quotidien. La sensibilisation centrale est donc réversible. Grâce à l’IRM fonctionnelle, des études récentes ont pu observer les changements dans la structure du cerveau des patient·es qui sont passés d’un état de migraine chronique à un état de migraine épisodique.

Comment se sortir de la
sensibilisation centrale?

La médication préventive pourrait avoir un effet positif en diminuant la fréquence des crises, en prévenant la chronicité et en limitant les changements au niveau du cerveau.

Voici d’autres moyens non pharmacologiques.

Les changements du cerveau qui mènent à la sensibilisation centrale peuvent être réversibles. Voici différentes stratégies pour stimuler des changements neuroplastiques qui permettent de retrouver un seuil de déclenchement de crise plus adéquat, et ainsi, améliorer la condition migraineuse. Ces stratégies contribuent à une meilleure gestion du stress, ce qui est également bénéfique lorsqu’on souhaite traiter la sensibilisation centrale.

  • Thérapie cognitivo-comportementale (TCC) : Ce type de thérapie est offert par un·e professionnel·le qualifié·e. Il peut aider les personnes qui vivent avec la migraine à apprendre de nouveaux modèles de pensée et de comportement. Vous pourriez par exemple approfondir ce que représente la migraine pour vous, la façon dont vous y réagissez et comment vous pourriez l’aborder autrement.
  • Thérapies d’acceptation et d’engagement (ACT) : Cette forme d’intervention mise sur l’acceptation et la pleine conscience, ainsi que sur l’engagement et les changements comportementaux. Elle explore entre autres l’aspect émotionnel de la douleur, le lâcher-prise envers ce qui ne peut pas être contrôlé, la distanciation par rapport à nos pensées non aidantes, l’exploration de ses valeurs profondes, la compassion envers soi-même et l’engagement dans le quotidien selon ses capacités. 
  • Méditation et pleine conscience : La pleine conscience propose de centrer son attention sur le moment présent, sans jugement. Les méditant·es expérimenté·es tendent à avoir une diminution d’activité cérébrale dans les régions du cerveau impliquées dans l’expérience de la douleur. Une étude a observé une diminution d’activité neuronale après seulement 4 jours de méditation ! Il est même possible de méditer en pleine conscience sur sa douleur. Il peut sembler contre-intuitif de focaliser son attention sur la douleur alors qu’on voudrait seulement l’oublier, la faire disparaître… Allez-y en mode exploratoire : pouvez-vous dessiner les contours de votre douleur ? a-t-elle une température, une couleur ? est-elle mouvante, fluctuante ? Vous pourriez être surpris·e des résultats !

L’activité physique d’intensité modérée, pratiquée régulièrement, diminue l’activation des neurones responsables du message de douleur. La recherche montre également que l’exercice aérobique contribue à la création de nouveaux neurones qui jouent un rôle dans la neuroplasticité. Une activité physique est considérée d’intensité modérée lorsqu’elle sollicite 70% de la capacité cardiaque de l’individu, et qu’elle génère un essoufflement qui permet encore de parler. Pour en tirer profit, il est important que l’activité physique soit perçue comme agréable. 

Cette stratégie est très efficace pour les personnes qui ont tendance à accorder une attention excessive à la douleur, par exemple, en entretenant des pensées catastrophiques en lien avec la douleur. La distraction consiste à vous engager dans une activité qui vous change les idées, qui occupe vos pensées à autre chose que la migraine. 

L’exposition à la lumière naturelle et le contact avec la nature favorisent la neuroplasticité et seraient associés à une diminution de la douleur.

Étant donné que la répétition  de la sensation de douleur contribue à la sensibilisation centrale, il est souhaitable de mettre en place des stratégies (pharmacologiques et non pharmacologiques) qui permettent de réduire l’amplification de la douleur : glace, chaleur, appareils d’électrothérapie, automassage, taping, etc.

Avez-vous pensé à essayer
la Démarche d’autogestion?

La démarche d’autogestion vous invite à réfléchir à vos habitudes de vie, à vos comportements et pensées en lien avec la douleur (et autres symptômes) et ce, afin d’initier des changements durables qui auront un impact sur votre état de santé et votre qualité de vie. Elle propose plusieurs stratégies qui s’appuient sur des études récentes sur la neuroplasticité! Par exemple : 

  • le module 1 propose des stratégies d’apaisement de la douleur et des symptômes lorsque vous vivez une crise
  • le module 2 vous invite à vous exposer progressivement à certains déclencheurs, afin d’abaisser votre seuil de sensibilité 
  • le module 3 aborde les bonnes pratiques de gestion du stress
  • le module 4 vous encourage à reprendre/adapter une activité significative
  • le module 5 propose un ensemble de stratégies pour mieux conserver votre énergie
  • le module 6 aborde entre autres l’anxiété liée à la douleur et aux symptômes, la peur de la prochaine crise, etc. 

L’autogestion, c’est reprendre du pouvoir sur la migraine. C’est, entre autres, tirer profit de la capacité de notre cerveau à modifier sa structure et son fonctionnement (neuroplasticité). 

Changer ses habitudes de vie (et de pensée!) est parfois un défi. La recherche montre qu’un tel processus est plus efficace lorsqu’il est entrepris en groupe, et supervisé par un·e intervenant·e qualifié·e. C’est pourquoi nous offrons des Ateliers d’autogestion de la migraine, en cohortes de 6 à 8 participant·es.