Mieux vivre avec la migraine

 

Syndrome d’hypotension
intracrânienne

Un article de Dre Elizabeth Leroux, neurologue et spécialiste en médecine des céphalées

Pour bien comprendre la céphalée par hypotension intracrânienne, il faut imaginer le cerveau dans la boîte crânienne, baigné par un liquide protecteur et nourricier, le liquide céphalo-rachidien (LCR). Ce liquide sert en quelque sorte de coussin qui empêche le cerveau de se frapper sur la boîte crânienne lorsque la tête bouge. Le cerveau et le liquide sont contenus dans un sac constitué de méninges. Les méninges sont en fait les enveloppes du cerveau! La méninge la plus épaisse se nomme la dure-mère. Ce sac de méninge se continue dans la colonne vertébrale, où il entoure la moëlle épinière, elle aussi baignée dans le LCR.

La plupart des céphalées par hypotension sont causées par une fuite de liquide céphalo-rachidien, en général par un trou dans la dure-mère.

Puisque le LCR fuit, la pression dans le sac méningé diminue, et ceci peut mener à différentes réactions dans la boîte crânienne. Privé de son coussinage liquide, le cerveau est plus sensible aux changements de position, ce qui entraîne les symptômes de l’hypotension intracrânienne.

Les symptômes de l’hypotension
intracrânienne sont nombreux

Le mal de tête est caractéristique. Le plus souvent, il est pire en position assise ou debout, car c’est dans cette position que le cerveau subit le plus de gravité et est tiré par le bas. On parle de céphalées posturales. La position couchée, même sans sommeil, soulage la céphalée rapidement. Cela dit, dans des cas plus chroniques, les variations posturales sont moins évidentes, et on peut voir un mal de tête qui se détériore au cours de la journée. Plusieurs personnes décrivent une douleur qui irradie vers le cou et les épaules. Le mal de tête peut être accompagné de nausées, de vomissements, de sensibilité aux sons et aux lumières.

À part la céphalée, d’autres symptômes sont décrits, souvent en lien avec l’impact des changements de pression sur les nerfs crâniens et les structures du cerveau. On note la vision double, les distorsions auditives, les acouphènes et, dans certains cas plus sévères, de la confusion.

Qu’est-ce qui cause le syndrome
d’hypotension intracrânienne?

Évidemment, ce syndrome peut être causé par plusieurs techniques telles que la ponction lombaire (on l’appelle alors céphalée post-PL) ou encore les épidurales et autres injections lombaires. Dans ce cas cependant, la cause est claire!

La cause la plus fréquente de l’hypotension dite spontanée est un trou, ou brèche, dans l’enveloppe des méninges. On pense que certaines personnes ont de petits becs osseux dans leur colonne et, par malchance, lors d’un mouvement, cet éperon, qui n’est en fait qu’une variation de l’anatomie, perce la dure-mère. Le syndrome peut commencer après un accident, parfois mineur, même un faux-mouvement de la colonne.

À part les brèches, il y a aussi des cas plus rares avec des diverticules (comme des petites poches dans le sac de méninges qui peuvent rupturer) et des fistules (un canal anormal qui relie le LCR au sang veineux).

Comment distinguer l’hypotension intracrânienne de la migraine et de la céphalée dite de tension?

Rappelons que les personnes vivant avec la migraine ont des crises intercalées avec des périodes sans symptômes, alors que l’hypotension provoque un mal de tête plus constant. La céphalée de tension est rarement constante, rarement invalidante, n’est pas posturale, et ne s’accompagne pas des symptômes typiques de l’hypotension.

Dans certains cas, le diagnostic de l’hypotension est très facile. Le syndrome peut commencer subitement, et la personne peut observer le mal de tête typique qui disparaît en position couchée, alors que tous les symptômes reviennent en position debout. Il n’y a pas d’autre syndrome qui ressemble à cela. Il est donc très important de retracer et décrire le début des symptômes.

Dans des situations plus subtiles, ou plus chroniques, le mal de tête devient moins postural, et présent depuis plus longtemps. Il peut alors ressembler à la migraine chronique.

La plupart des personnes ayant la migraine chronique ont mal dans le cou, plusieurs ont des acouphènes, des nausées, de la vision floue, et souvent le fait de s’allonger améliore le mal de tête en raison du repos plus que de la posture. On peut donc dire qu’il faut une certaine expertise pour distinguer la migraine chronique de l’hypotension intracrânienne. Une consultation en neurologie est toujours indiquée.

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En savoir plus sur la céphalée dite de tension

Quels sont les tests disponibles?

En général, on commence par une IRM cérébrale avec du contraste (un produit intraveineux appelé gadolinium, administré avec l’examen). Ce test va révéler des anomalies pour 80-85 % des personnes. Une IRM de la colonne est parfois utile. Si le diagnostic est clair, on procède au traitement détaillé ci-dessous.

Si l’IRM est normale, alors il faut planifier prudemment. Certains cliniciens vont d’emblée recommander un traitement si les symptômes sont typiques, et la réponse au traitement (le fameux blood patch) va prouver le diagnostic. Mais lorsque le diagnostic est incertain, des tests plus avancés comme le CT Myéloscan peuvent être utilisés avant de se lancer dans les traitements. Ceci demande une collaboration avec un radiologiste expérimenté et un suivi clinique attentif.

Quels sont les traitements recommandés?

Si le syndrome vient de commencer, il arrive que le repos au lit pendant 1 à 2 semaines puisse régler le problème. La caféine est en général utile pour soulager la douleur. Le mal de tête est très difficile à soulager, même avec des analgésiques puissants. La position couchée reste souvent le seul soulagement possible.

Le blood patch (terme souvent utilisé même en français) est la technique la plus utilisée. On prélève un peu de sang du patient, et on injecte ce sang au niveau de la colonne lombaire, juste autour du sac de méninges. En faisant ceci, on espère rétablir la pression dans le système, et possiblement boucher le trou.

Si le blood patch lombaire ne fonctionne pas, et qu’une fuite a été trouvée, alors on peut tenter de cibler la fuite avec un blood patch ciblé. On peut aussi utiliser des colles biologiques de fibrine au lieu du sang. Dans de rares cas, il faut faire une chirurgie, surtout si la brèche est grosse. Les très rares cas de fistule doivent être gérés par des équipes spécialisées.

Quoi faire si le diagnostic n’est pas clair?

Dans les situations incertaines où le mal de tête ressemble à une hypotension mais aucune brèche n’est trouvée, on tente parfois les traitements utilisés pour la migraine chronique. En fait, il n’est pas rare de traiter une personne chez qui le diagnostic d’hypotension a été évoqué et jamais prouvé, et qui peut-être finalement présente une migraine chronique, donc cette approche est raisonnable. Les traitements pour la prévention de la migraine incluent plusieurs médicaments oraux, le Botox et les anticorps CGRP.

Le traitement de l’hypotension intracrânienne devrait être géré par un·e neurologue, et dans certains cas un·e spécialiste en médecine des céphalées en lien avec une équipe interdisciplinaire.

Si vous voulez en savoir plus sur le syndrome d’hypotension intracrânienne, n’hésitez pas à consulter le site web Fuite Spinale LCS Canada.